le 5 décembre 2019
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Par: Grace Huang, Carmen Tang, Auritro Kundu, Maksim Piskunov, Stewart Boxall et Dillon Culhane
Regard sur 2020
6.5 min de lecture
Nous allons bientôt entrer dans une nouvelle année, mais également dans une nouvelle décennie. Que réserve l’avenir aux investisseurs? Il sera ici question de technologies, de tendances, de voyages et de traitements qui pourraient représenter des occasions au cours des dix prochaines années et même au-delà.
L’autoroute de l’information en mode turbo
Grace Huang
La technologie sans fil de cinquième génération (5G) fait l’objet d’âpres débats. Un peu partout dans le monde, des gouvernements s’interrogent à savoir si cette dernière avancée des réseaux de télécommunications et ceux qui les fabriquent représentent une grave menace pour leur sécurité nationale.
Pourtant, la 5G commence déjà à se déployer dans certains pays et elle aura de profondes répercussions sur les investisseurs au cours des prochaines années.
La 5G est essentielle au développement de l’économie numérique. Elle représente une amélioration majeure par rapport aux générations précédentes de communications sans fil : elle offrira une largeur de bande et une vitesse sans précédent et permettra de traiter les ensembles de données de plus en plus complexes qui sont nécessaires au plein essor d’innovations comme l’Internet des objets, l’intelligence artificielle, la réalité virtuelle et augmentée et l’automatisation.
Selon la société de recherche mondiale IHS Markit, la 5G pourrait avoir des répercussions sur 16 secteurs différents à l’échelle mondiale et générer un chiffre d’affaires de 13 200 milliards de dollars US d’ici 2035. Elle créera des occasions d’investissement dans plusieurs domaines, notamment dans la fabrication de pylônes et de matériel de communications, la fabrication de semi-conducteurs, les télécommunications, la fabrication de téléphones intelligents et la création de jeux vidéo, ainsi qu’auprès de nombreuses autres sociétés de produits offerts au grand public.
Au cours des 25 prochaines années, les États-Unis et la Chine devraient représenter 53 % des investissements moyens totaux en recherche et développement dans le domaine de la téléphonie cellulaire et des dépenses en immobilisations.
Aussi, la concurrence entre les différents pays sera féroce au cours des prochaines années. La Corée du Sud a certes été le premier pays à lancer des appareils mobiles utilisant la 5G en avril 2019, mais, au cours des 25 prochaines années, les États-Unis et la Chine devraient représenter 53 % des investissements moyens totaux en recherche et développement dans le domaine de la téléphonie cellulaire et des dépenses en immobilisations dans la chaîne de valeur des communications mobiles 5G, selon IHS Markit.
Au total, le secteur mondial des télécommunications sans fil devrait voir ses revenus annuels augmenter de centaines de milliards de dollars au cours de la prochaine décennie. Une telle augmentation serait attribuable en partie au fait que les entreprises de télécommunications pourraient récupérer leur pouvoir de fixation des prix sous l’effet des nouvelles occasions offertes par les segments commerciaux et industriels du marché et par le regroupement progressif des secteurs.
La 5G comporte également des risques. Les craintes liées à la sécurité risquent de continuer à ralentir le déploiement de la 5G à l’échelle mondiale, tout comme les inquiétudes persistantes liées à l’ampleur des coûts de construction des réseaux de nouvelle génération. Quoi qu’il en soit, on voit mal comment on pourrait se passer de la 5G à l’avenir.
Maintenant, c’est personnel
Carmen Tang
Le marché de la médecine personnalisée commence à prendre de l’ampleur, offrant de nouveaux horizons pour les investisseurs. C’est particulièrement le cas dans le domaine de l’oncologie où la génomique permet à l’industrie pharmaceutique mondiale d’envisager de nouveaux traitements plus ciblés et moins invasifs.
Selon certaines estimations, ces applications présentent une valeur commerciale potentielle de près de
21 milliards de dollars US, ce qui toutefois ne tient pas totalement compte des tests de biopsie liquide qui pourraient bientôt permettre de repérer des cas de cancer chez des patients asymptomatiques. Il faudra peut-être encore du temps avant que la médecine personnalisée et le séquençage de l’ADN atteignent une ampleur déterminante, mais cela pourrait en valoir la peine.
Les progrès réalisés dans le domaine des tests génétiques, par exemple, pourraient bientôt déboucher sur un nouveau choix normalisé de traitements pour les patients souffrant d’un cancer du poumon : au lieu des traditionnelles biopsies tissulaires, un simple prélèvement à l’aide d’une aiguille permettra de déterminer les biomarqueurs de protéines spécifiques d’une tumeur et le médicament le mieux approprié à son traitement.
Ces tests, appelés communément biopsies liquides, pourraient permettre un meilleur suivi de la réponse de chaque patient à certains traitements pharmacologiques, y compris ceux qui consistent à stimuler son propre système immunitaire. Avec l’immunothérapie, il peut arriver que la tumeur grossisse avant de finir par diminuer à mesure que les cellules cancéreuses sont tuées, ce qui peut compliquer l’interprétation des tomodensitogrammes. Mais, en évaluant la quantité d’ADN de la tumeur présente dans le sang, il est possible de déterminer plus rapidement et de façon précise la façon dont un patient répond au traitement.
Un simple échantillon de sang permet également de détecter les récidives de cancer plus tôt qu’avec les méthodes actuelles, qui passent souvent elles aussi par la tomodensitométrie. L’un de ces tests consiste à séquencer l’ADN de la tumeur afin de repérer les mutations génétiques les plus courantes se trouvant dans la tumeur principale du patient.
Selon certaines estimations, ces applications présentent une valeur commerciale potentielle de près de 21 milliards de dollars US, ce qui toutefois ne tient pas totalement compte des tests de biopsie liquide qui pourraient bientôt permettre de repérer des cas de cancer chez des patients asymptomatiques.
Il faudra peut-être encore du temps avant que la médecine personnalisée et le séquençage de l’ADN atteignent une ampleur déterminante, mais cela pourrait en valoir la peine.
Début du compte à rebours
Auritro Kundu
Le tourisme spatial reste hors de portée pour la plupart des investisseurs, mais il se rapproche : le coût des lancements spatiaux diminue en effet de manière spectaculaire sous l’effet des investissements réalisés par une nouvelle génération de sociétés qui sont financées par des milliardaires, comme SpaceX, Blue Origin et Virgin Galactic. D’ici 2040, le secteur devrait représenter 1 500 milliards de dollars US, soit 5 % du PIB américain, contre 385 milliards de dollars US en 2017, selon la Chambre de commerce des États-Unis.
La récente entrée en bourse de Virgin Galactic traduit la détermination de la société à offrir une expérience unique et luxueuse à une clientèle bien nantie. La société estime que son marché potentiel totalisera 2,3 millions de personnes en 2023, ce qui représente à peine 0,1 % des personnes fortunées (dont le patrimoine dépasse 10 millions de dollars). D’ici 2023, Virgin Galactic souhaite effectuer 270 vols par année à l’aide de cinq navettes spatiales, ce qui correspond au transport de 1 565 passagers. Chacun de ceux-ci devra payer 250 000 $ pour son voyage dans l’espace, ce qui devrait produire des revenus de 590 millions de dollars pour l’entreprise. Virgin Galactic estime qu’en définitive elle pourra cibler un marché potentiel d’environ 40 millions de personnes (ayant un patrimoine entre 1 et 10 millions de dollars US), lorsque ses activités se seront développées et que ses coûts auront baissé sous l’effet des gains de productivité et des progrès technologiques. En attendant, SpaceX a déjà accepté de transporter le milliardaire japonais Yusaku Maezawa vers la Lune lors d’une mission touristique prévue en 2023.
D’ici 2040, le secteur devrait représenter 1 500 milliards de dollars US, soit 5 % du PIB américain, contre 385 milliards de dollars US en 2017, selon la Chambre de commerce des États-Unis.
L’ère du tourisme spatial marquera l’avènement de vaisseaux spatiaux réutilisables, de nouveaux moteurs de fusées hybrides, de mécanismes de rentrée dans l’atmosphère plus efficaces et de la miniaturisation de composants électroniques, autant d’éléments qui permettront de faire baisser les coûts. Grâce aux fusées réutilisables, les coûts des lancements spatiaux pourraient diminuer de 100 %, selon une analyse de la Bank of America. La mise au point de fusées beaucoup plus grosses pourrait faire baisser davantage les coûts et mener à d’autres innovations spatiales à long terme, comme le transport interurbain. S’il était possible de ramener de 10 ou 12 heures à 2 ou 3 heures le temps de vol entre de grandes villes, il pourrait y avoir une demande pour ce type de service, notamment chez les clients fortunés, ce qui pourrait avoir, au bout du compte, des répercussions sur le secteur du transport aérien.
Il faudra toutefois attendre pour voir quel impact les voyages spatiaux auront sur les investisseurs et leurs portefeuilles. Le compte à rebours est bel et bien commencé.
La perturbation dans les placards
Maksim Piskunov
La technologie a manifestement contribué à modifier les habitudes des consommateurs ces dernières années. Que ce soit pour trouver une voiture ou pour louer une maison de vacances, nous achetons, vendons et louons plus qu’aucune génération avant nous et sommes constamment à la recherche de nouveaux modes de transaction.
La prochaine grande vague de perturbation pourrait bien déferler sur le contenu de nos placards. Ces dernières années, la location de vêtements (Clothing as a Service ou CaaS) et la revente en ligne se sont imposées parmi les segments les plus dynamiques du marché global des vêtements et accessoires et le phénomène pourrait encore s’accentuer sous l’effet combiné de tendances allant bien au-delà des seules capacités technologiques.
La première est la recherche de prix abordables et l’accroissement de l’esprit d’épargne, à mesure que l’écart entre les revenus des ménages et le goût du luxe manifesté par les « influenceurs » ne cesse de se creuser.
Au cours des 10 prochaines années, on estime que les vêtements d’occasion deviendront plus de 2X plus en demande et qu’ils pourraient occuper le tiers des placards d’ici 2033.
Source : estimations de GlobalData sur la taille et la croissance du marché (2019).
La deuxième tendance réside dans l’importance croissante accordée dans les débats publics à la durabilité face aux craintes liées aux changements climatiques. Au moins les deux tiers des acheteurs de la génération Z ont effectué un achat écologique au cours de la dernière année, selon un sondage de CGS. Et, face à un rejet de la surconsommation, certaines des plus grandes marques de mode du monde offrent maintenant un service de recyclage de vêtements afin de rester en phase avec leur clientèle.
On observe également un désir croissant de nouveauté et de variété, et 56 % des 18 à 29 ans préfèrent les détaillants qui offrent quelque chose de nouveau à chaque visite, selon une étude de GlobalData.
Ainsi, les vêtements d’occasion sont de plus en plus acceptés, plus particulièrement chez les jeunes. Le phénomène alimente le marché des articles de luxe en consignation : plusieurs marques de vêtements (grand public ou autre) mènent actuellement des expériences de location et de services d’abonnement dans l’espoir de fidéliser la clientèle et d’améliorer leurs marges de bénéfices.
Tous ne profiteront pas de cette dernière perturbation, mais les détaillants qui sauront s’y adapter parviendront à se tailler une plus grande place dans nos placards.
Un phénomène qui n’a rien d’artificiel
Stewart Boxall
Il y a dix ans, il semblait impossible qu’un ordinateur puisse battre un champion du jeu de Go. Dans ce jeu très complexe, inventé il y a 3 000 ans en Chine, le nombre de déplacements possibles dépasse le nombre total d’atomes que l’on retrouve dans l’univers.
C’est pourtant arrivé. Au début de 2016, AlphaGo, un programme assisté par intelligence artificielle mis au point par Google, a battu le champion Lee Sedol, titulaire de 18 titres mondiaux, lors de quatre parties sur cinq; à peine quelques mois plus tard, AlphaGo Master, la version suivante du programme, a joué contre 60 joueurs de Go professionnels et les a tous battus.
Depuis, l’intelligence artificielle et les technologies connexes, comme l’apprentissage automatique, la reconnaissance de la parole et du langage naturel et le traitement de l’image, ont encore progressé. Elles ne sont pas au point de remplacer l’humain à tous les points de vue, mais leur avancement leur suffit pour effectuer certaines tâches précises avec plus d’adresse et beaucoup plus vite que nous.
D’ici 2025, le marché de l’intelligence artificielle devrait totaliser près de 209 milliards de dollars US, contre 24 milliards de dollars US en 2018, ce qui correspond à un taux de croissance annuel composé de 36 %, selon la société d’études de marché BrandEssence.
Par ailleurs, l’intelligence artificielle joue un rôle clé dans le développement des avancées technologiques les plus attendues, notamment celles qui façonneront les secteurs des transports, de la fabrication, de la santé et des placements pour les années à venir. D’ici 2025, le marché de l’intelligence artificielle devrait totaliser près de 209 milliards de dollars US, contre 24 milliards de dollars US en 2018, ce qui correspond à un taux de croissance annuel composé de 36 %, selon la société d’études de marché BrandEssence.
L’intelligence artificielle sera au cœur de plusieurs nouvelles occasions d’investissement et soutiendra également de plus en plus les investisseurs dans leurs prises de décision. En fait, aussi complexe que puisse être le jeu de Go, le monde des placements est beaucoup plus compliqué encore et l’apprentissage automatique de même que le traitement du langage naturel aident déjà les gestionnaires d’actifs à intégrer des sources de données non traditionnelles à leur recherche.
Cela inclut certains renseignements non structurés comme des images satellites de stationnements pour évaluer l’offre et la demande en temps réel, ainsi que des transcriptions de conférences sur les résultats financiers permettant de se faire une idée de l’opinion des dirigeants des entreprises.
En résumé, même si elle est encore loin d’être omniprésente, l’intelligence artificielle n’a depuis longtemps plus rien d’anecdotique et elle est appelée à exercer une influence croissante sur nos vies avec le temps.
La transition énergétique est à nos portes
Dillon Culhane
Face à l’intensification des changements climatiques, le besoin d’agir rapidement s’impose pour réduire les émissions de carbone à l’échelle mondiale. Une transition énergétique d’envergure est nécessaire pour réduire l’intensité des émissions tout en répondant à la hausse de la demande croissante d’énergie mondiale. Cette transition nécessitera des milliards de dollars d’investissements dans les énergies renouvelables, les infrastructures électriques, les batteries, le captage et le stockage de carbone et d’autres solutions potentielles au cours des prochaines décennies.
Les principales sources d’émissions de carbone à l’échelle mondiale sont la production d’énergie (40 %) et le transport (25 %), selon l’Agence internationale de l’énergie. Des progrès ont été réalisés dans de nombreux secteurs; notamment, l’énergie produite à partir de charbon a été remplacée par le gaz naturel et des énergies renouvelables moins polluantes. L’énergie solaire et l’énergie éolienne sont concurrentielles, par rapport à celle des centrales au charbon et au gaz dans certaines régions, et elles devraient continuer à se développer de façon soutenue. Toutefois, dans la plupart des pays, les énergies renouvelables ne pourront pas à elles seules répondre à la demande d’électricité de base sans une percée technologique majeure dans le domaine des batteries. L’offre d’électricité mondiale continuera donc de reposer essentiellement sur une combinaison de gaz naturel, d’hydroélectricité et d’énergie nucléaire.
Les principales sources d’émissions
de carbone à l’échelle mondiale sont
la production d’énergie (40 %)
et le transport (25 %).
En ce qui concerne le transport, les véhicules électriques sont la solution évidente pour réduire les émissions, mais leur adoption varie considérablement d’une région à l’autre en fonction des politiques publiques, des subventions, des tendances démographiques, des niveaux de revenus, du climat et des besoins d’autonomie. Il est beaucoup plus difficile d’électrifier les véhicules lourds (camions, trains), les navires de la marine marchande et les avions, qui continueront tous à dépendre des carburants fossiles pendant encore des décennies. L’amélioration constante de l’efficacité énergétique, le recours au gaz naturel liquéfié et les biocarburants (à base de déchets, de gras animal ou d’algues) peuvent tous contribuer à réduire l’intensité des émissions dans ce secteur.
Les technologies de captage et de stockage de carbone (CSC) contribueront également à l’atteinte des cibles de réduction d’émissions. Elles consistent à capter et à stocker le carbone, habituellement dans des formations géologiques souterraines, et à créer ainsi des émissions négatives afin de compenser les émissions de carbone difficiles à réduire de certains secteurs, comme quelques processus industriels (production de ciment et d’acier), le transport lourd et le transport aérien.
La transition énergétique ne sonne pas le glas des carburants fossiles, mais elle permet sans doute de profiter de l’augmentation des investissements dans les énergies renouvelables, les batteries et les technologies de réduction des émissions.
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