Perspectives de mi-année : 7 questions à l’approche du deuxième semestre de 2023
5 min de lectureLes marchés boursiers ont rebondi au cours du premier semestre de l’année, les banques centrales ayant poursuivi leur lutte contre l’inflation sans conséquence grave pour l’économie. Pourtant, le risque d’une récession persiste et les investisseurs pourraient ne pas être à l’abri de la volatilité et des pertes qui ont nui aux rendements de nombreux portefeuilles en 2022.
Les membres du bureau du chef des investissements d’AGF se sont récemment réunis pour discuter de ce qui pourrait se produire sur les marchés financiers au cours des six prochains mois et des manières possibles de s’y retrouver.
Les questions et les réponses qui suivent ont été modifiées à des fins de clarté et de concision.
Croyez-vous que l’économie se dirige vers une récession?
Kevin McCreadie (KM) : La réponse courte est oui, mais chaque pays évolue à des rythmes différents vers une récession. L’économie européenne devrait être la première à tomber en récession, peut-être même au prochain trimestre, car elle continue de lutter contre une inflation beaucoup plus élevée qu’en Amérique du Nord. Dans d’autres économies, comme aux États-Unis et au Canada, la récession semble également inévitable, mais elle ne surviendra peut-être pas avant plusieurs mois ou trimestres.
Cette situation découle en grande partie du fait que le resserrement de la politique monétaire (c.-à-d. la hausse des taux) agit avec un décalage, ce qui signifie qu’il faut souvent beaucoup plus de temps que le croient bon nombre d’investisseurs pour qu’il y ait un impact négatif sur la croissance de l’économie. En même temps, les pays n’ont pas tous la même sensibilité à la hausse des taux, plus particulièrement en ce qui a trait à l’habitation.
Aux États-Unis, par exemple, les propriétaires sont moins touchés par la hausse des taux hypothécaires, car bon nombre d’entre eux ont des prêts hypothécaires de 30 ans qui n’auront pas besoin d’être refinancés au cours des prochaines années. Toutefois, au Canada, la durée des prêts hypothécaires est plus courte et un plus grand nombre de propriétaires devront renouveler leur prêt à des taux beaucoup plus élevés au cours des prochaines années. En retour, cet écart pourrait finir par avoir une incidence plus importante sur le portefeuille du consommateur canadien que sur celui du consommateur américain, et donc jouer un rôle dans le moment ou l’ampleur d’une récession dans chacun de ces pays.
David Stonehouse (DS) : La résilience de l’économie face à la hausse des taux d’intérêt peut être attribuée en partie aux prestations résiduelles de la pandémie et aux économies excédentaires qui contribuent à stimuler les dépenses de consommation. De plus, comme il s’agit de la première année depuis 2019 où nous en avons vraiment fini de la pandémie, la demande de services comme les divertissements et les voyages est demeurée forte. Toutefois, les risques de récession devraient augmenter à l’approche de l’hiver et du printemps de l’année prochaine, surtout aux États-Unis, où certains indicateurs économiques commencent à susciter des inquiétudes, notamment les demandes initiales hebdomadaires de prestations d’assurance-chômage qui se sont accélérées au cours du dernier mois et qui sont maintenant à leur plus haut niveau (moyenne mobile sur quatre semaines) en plus d’un an.
Bien entendu, il en va de même pour l’économie canadienne. En fait, la dynamique de son marché de l’habitation pourrait mener à une récession encore plus grave que celle aux États-Unis. La politique d’immigration du pays, qui contribue à soutenir l’économie d’une manière qui va à l’encontre des données fondamentales sous-jacentes, est une inconnue.
Rune Sollihaug (RS) : De manière anecdotique, j’ai entendu dire que les gens réduisaient leurs vacances annuelles parce que leurs versements hypothécaires avaient considérablement augmenté au moment du renouvellement. Et les amortissements sont de plus de 50 ans pour certains de ces prêts hypothécaires à taux variable et à versements fixes au Canada. La douleur est donc bien réelle.
John Christofilos (JC) : Le marché canadien de l’habitation est depuis longtemps sous pression et a été vendu à découvert (sans succès) par les investisseurs à de nombreuses reprises au cours des 15 dernières années sous prétexte qu’il allait s’effondrer. Cette fois-ci sera peut-être différente, mais je suis moins inquiet que le reste de ce groupe, en partie à cause de l’immigration. Bien que la hausse des taux puisse freiner la demande, l’offre n’est toujours pas suffisante pour répondre à la demande.
Stephen Way (SW) : Nous sommes probablement tous d’accord pour dire qu’une récession est probable aux États-Unis, mais pas avant la fin de l’année au plus tôt. Bien que le resserrement des conditions de crédit et les indicateurs comme l’inversion de la courbe des taux soutiennent l’idée d’une contraction, les écarts de taux demeurent relativement solides pour l’instant, tout comme les conditions financières dans leur ensemble. La grande question est peut-être de savoir quelle sera la gravité de la récession une fois qu’elle se produira. Habituellement, lorsque la Fed resserre aussi rapidement son taux directeur, elle provoque un accident qui peut aggraver la situation. En fait, nous avons peut-être déjà évité une catastrophe en ce qui concerne l’effondrement de la Silicon Valley Bank. Même si, au départ, cela semblait être ce qui ferait pencher la balance, ce n’est pas ce qui s’est produit.
En Europe, l’Allemagne a déjà connu une récession technique cette année. Le Royaume-Uni a à peine progressé et fait face à une inflation plus persistante que les autres pays du G7. Par conséquent, il ne serait pas surprenant que la croissance en Europe continue de stagner ou de s’aggraver pendant les 12 prochains mois.
KM : L’économie chinoise pourrait être l’exception à ces perspectives. Alors que la plupart des économies occidentales sont confrontées à un resserrement des conditions, on s’attend à ce que le gouvernement chinois prenne davantage de mesures de relance.
SW : La réouverture de la Chine à la suite de la pandémie a été décevante, mais la trajectoire à partir de là devrait être positive, quoique largement tributaire de l’ampleur des mesures de relance. L’économie japonaise se porte aussi relativement bien. Elle continue de se redresser après les confinements de la COVID-19 et profite de l’augmentation du tourisme. Même s’il est prévu que la croissance sera la même qu’aux États-Unis, cette situation est plutôt inhabituelle et il se peut qu’elle n’ait pas besoin d’autant de mesures de relance que d’autres économies pour maintenir sa croissance à flot.
Quelles mesures les banques centrales prendront-elles durant le deuxième semestre de l’année?
Bill DeRoche (BD) : Il semble évident que la Réserve fédérale américaine ne baissera pas ses taux cette année, mais il est moins évident de savoir dans quelle mesure elle pourrait encore les augmenter. Les analystes s’attendent à deux autres hausses, mais j’aimerais que la Fed n’en fasse qu’une et attende un peu. Si elle faisait preuve d’un peu de patience, ce serait bon pour l’économie.
JC : La possibilité que la Fed relève le taux à une ou deux reprises m’indiffère. Les taux ont déjà augmenté de 500 points de base. Il est donc plus important pour les investisseurs de se concentrer sur le fait que le cycle tire à sa fin.
KM : Pour revenir à ce que disait John, le mal est fait. On devrait se concentrer sur le moment où la Fed décidera de commencer à réduire ses taux. Certains investisseurs sous-estiment peut-être l’idée que la Fed ne réduit pas ses taux, même en période de récession. Et cela vaut également pour les autres banques centrales dans le monde. Les moyens de réduire les taux d’intérêt dès le premier signe d’une contraction négative de la croissance pourraient ne pas être les mêmes qu’au cours des 30 dernières années, en raison surtout de la lutte contre l’inflation.
SW : On pourrait soutenir qu’une baisse des taux en raison d’une récession serait une erreur politique si l’inflation demeure élevée. C’est pourquoi il est important de maintenir les taux à la hausse plus longtemps.
RS : Il est également possible que l’inflation remonte de nouveau, ce qui pourrait avoir une incidence sur la direction des taux d’intérêt. Par exemple, que se passera-t-il si l’Europe vit un automne froid et que les prix de l’énergie sont poussés à la hausse? Ou quel sera l’impact potentiel des événements météorologiques défavorables qui continuent de se produire partout dans le monde sur les prix des aliments?
DS : En plus des hausses de taux, les investisseurs ne devraient pas perdre de vue le programme de resserrement quantitatif de la Fed. Le marché n’en parle pas beaucoup, mais si ce programme se poursuit et réduit la liquidité du marché, cela pourrait constituer un autre obstacle.
KM : S’il y a un élément positif, c’est que les banques centrales ont maintenant des ressources pour réagir si une récession se produit. Cela n’aurait pas été le cas lorsque les taux étaient encore près de zéro.
Le marché haussier des actions américaines continuera-t-il durant le deuxième semestre de cette année?
JC : Je ne suis même pas certain que nous soyons dans un marché haussier. Techniquement, c’est le cas, car les principaux indices comme l’indice S&P 500 ont progressé de plus de 20 % par rapport à leur creux d’octobre, mais nous n’avons certainement pas l’impression d’être dans une telle situation. En fait, seuls quelques titres ont affiché un rendement de 20 % ou plus au cours de cette période. Le reste de l’indice est bien en deçà de ce seuil.
Je ne suis donc pas convaincu que le rendement sera le même au deuxième semestre de l’année, mais plutôt qu’il augmentera plus lentement avec une volatilité persistante. Par conséquent, les investisseurs devront se concentrer sur les occasions liées aux perturbations du marché qui pourraient survenir dans de nombreux secteurs.
BD : Je suis d’accord. Cela ne ressemble pas à un marché haussier, qui est habituellement alimenté par les perspectives d’une meilleure croissance des bénéfices à l’avenir. Mais compte tenu du décalage dont nous avons parlé au sujet de la politique des banques centrales, cela ne semble pas probable au cours des prochains trimestres. Ce n’est pas du tout un climat d’appétit pour le risque.
SW : À cette fin, les marges bénéficiaires se situent actuellement à des niveaux très élevés, mais il est peu probable qu’elles se maintiennent étant donné que les coûts continuent d’augmenter pour de nombreuses sociétés.
KM : Au-delà des quelques titres qui ont fait grimper l’indice S&P 500, celui-ci est essentiellement stable. Si les données économiques commencent à s’affaiblir et que la Fed ne commence pas à réduire les taux comme beaucoup s’y attendent, il est très probable que l’indice baisse. Peut-être ne reviendra-t-il pas aux creux d’octobre, mais la baisse pourrait être importante. En outre, la prochaine hausse importante pourrait ne pas se produire avant que l’économie américaine ne soit complètement en récession et que la Fed ne commence à baisser ses taux.
SW : Le marché boursier n’atteint habituellement pas son creux avant une récession. Il s’écoule habituellement de 30 à 60 jours entre la déclaration et le rebond. Par conséquent, si ce groupe a raison au sujet de la récession que nous prévoyons, il semble qu’une baisse des actions soit encore à prévoir.
Que pensez-vous des marchés obligataires au deuxième semestre?
DS : Je pense que c’est du pareil au même. En 2022, nous avons connu le pire marché depuis des décennies, et nous nous attendions à ce que les marchés obligataires soient beaucoup plus optimistes cette année. C’est ce qui s’est produit jusqu’ici. Le premier semestre s’est bien déroulé, mais n’a pas été nécessairement exceptionnel, et je crois que c’est ce qui nous attend aussi au deuxième semestre. Si nous ne considérons pas qu’une récession est imminente, si nous pensons que les banques centrales maintiendront le cap et si les taux sont nettement inférieurs aux taux directeurs des banques centrales, alors la perspective d’une baisse substantielle des taux à partir de maintenant et de gains démesurés semble plutôt mince. Nous ne croyons donc pas qu’il y aura une énorme augmentation à court terme. De la même manière, nous estimons que le pire de l’inflation est derrière nous. Nous ne nous attendons pas à une hausse substantielle des taux directeurs ou de l’inflation, et il est maintenant assez facile de tirer 5 % ou plus des coupons obligataires, ce qui est assez concurrentiel. Je suis donc d’avis que c’est le genre de contexte dans lequel nous nous trouvons, où l’on peut obtenir des rendements raisonnables, mais pas nécessairement exceptionnels.
J’ajouterais toutefois que les obligations offrent une option d’achat. Si nous nous heurtons à un véritable problème économique ou géopolitique, les taux peuvent chuter assez rapidement et procurer un rendement supplémentaire en plus du coupon qui n’existait pas il y a trois ans. Non seulement vous obtenez un coupon raisonnable, mais vous profitez aussi d’une protection contre les baisses.
KM : Vous n’aurez pas le spectre des rendements négatifs, même si les banques relèvent les taux à quelques reprises. Les coupons offrent actuellement un rendement suffisant pour compenser le risque lié à la duration. Mais je crois que vous devez regarder autour de vous et concevoir un rendement différent de celui que vous aviez dans le passé. L’écart de taux des obligations à rendement élevé est suffisamment important pour que, même s’il s’élargit, il y ait encore un certain rendement. Il en va de même pour les titres de créance des marchés émergents. Et si vous pouvez détenir des titres de créance privés, vous vivrez peut-être une meilleure situation en matière de titres à revenu fixe cette année.
D’un autre côté, certaines personnes prennent peut-être trop d’avance. J’entends dire que de nombreux conseillers misent sur les titres à revenu fixe à long terme, estimant que la courbe des taux s’accentuera immédiatement. Je pense que ce pourrait être un jeu dangereux à court terme, car personne ne sait quelle sera la trajectoire des baisses de taux.
DS : Ce qui me préoccupe le plus, c’est que le degré d’inversion ne permet pas de réaliser des gains importants dans le segment à long terme du marché en ce moment, à moins d’un effondrement et d’un revirement massif. Et comme nous l’avons dit plus tôt, ce n’est pas ce que nous prévoyons.
Où voyez-vous les meilleures occasions potentielles sur les marchés au deuxième semestre?
KM : Le marché boursier s’est probablement un peu emballé. À court terme, j’envisagerais de conserver plus de liquidités, qui vous donnent au moins quelque chose, que je ne l’aurais fait au début de l’année. Je me rapprocherais davantage d’une position neutre, plutôt que d’une surpondération, sur les titres à revenu fixe, parce que le risque d’un rendement négatif est probablement derrière nous et qu’en cas de récession inattendue, il pourrait y avoir une remontée des obligations. Bien entendu, la façon de financer cela est de sortir des actions, ce qui implique de commencer à sous-pondérer un peu les actions en ramenant les liquidités et les titres à revenu fixe à un niveau neutre.
BD : Si vous examinez les facteurs, vous constaterez qu’ils se situent tous dans une fourchette relativement neutre. Il n’y a pas d’extrêmes. Je crois que la qualité est un peu plus étendue, car les gens ont adopté une orientation défensive à l’égard de la répartition des actions. Le bêta faible ou le risque faible sont également prolongés, mais pas à des niveaux extrêmes. Il n’y a donc rien d’intuitivement évident qui vous permette de faire de l’argent facilement. Je pense qu’il faut bien y réfléchir. Je suis plus neutre à l’égard des actions. L’économie se porte très bien. Et si la Fed est en mesure de ménager la chèvre et le chou, même si elle n’a jamais réussi à le faire, je crois que les actions continueront de bien se comporter. Le risque le plus important concerne la croissance économique. Les dommages ont été faits sur le marché des titres à revenu fixe, et la Fed a établi sa bonne foi et ne laissera pas l’inflation remonter. Donc, si je devais me concentrer sur le risque entre l’inflation et la croissance, je serais plus préoccupé par la croissance.
Cela soutient la réflexion sur les actions et certains titres souverains. Si la croissance est plus faible que prévu, nous nous attendrons à ce que le marché obligataire se redresse et si, pour une raison ou une autre, la croissance est meilleure, vous devriez avoir une exposition neutre aux actions et bien vous en sortir. C’est donc une pensée légèrement différente de celle de Kevin.
DS : Lorsqu’on examine certains segments du marché – petites capitalisations, moyennes capitalisations, titres convertibles – bon nombre d’entre eux ont atteint un sommet au printemps ou à l’automne 2021. Ils sont dans un marché baissier ou, au mieux, dans une fourchette étroite depuis maintenant deux ans, et leurs valorisations ne sont pas aussi exigeantes que celles des mégacapitalisations. Vos occasions pourraient être meilleures dans ces segments du marché.
J’aimerais juste ajouter quelques commentaires sur les liquidités en particulier. Oui, elles sont plus compétitives qu’avant et il est toujours bon d’en avoir un peu. Mais n’oubliez pas que, surtout au Canada, une bonne partie des liquidités n’est peut-être pas destinée aux marchés des capitaux, car les consommateurs peuvent éprouver des difficultés et plutôt les utiliser à des fins économiques. L’autre point est que les liquidités pourraient ne vous procurer aucun potentiel de hausse. Nous avons vu ce phénomène se produire à plusieurs reprises. Lorsque tout le monde se précipite sur les CPG, c’est généralement au mauvais moment. Tout le monde se demande pourquoi il faudrait détenir des obligations. La réponse est qu’elles vous offrent un potentiel de protection. Si les choses se gâtent vraiment, vous n’obtiendrez pas plus que le rendement de vos liquidités ou CPG, mais le marché obligataire vous offrira un potentiel de hausse.
JC : Il y a trois secteurs dans lesquels je chercherais des occasions. Le premier est celui des marchés émergents avec le dollar américain qui pourrait atteindre un sommet. Pour le deuxième, je comparerais le Canada aux États-Unis. L’écart est beaucoup trop grand et je pense que le Canada surpassera les États-Unis au second semestre. Et pour le troisième, je considérerais certains volets particuliers du secteur financier – surtout les gestionnaires d’actifs, les courtiers et les bourses – comme un secteur d’intérêt, alors que nous commençons à sortir ou à nous approcher de la fin du cycle de hausse des taux.
KM : Les marchés émergents hors Chine se sont relativement bien comportés et pourraient profiter d’un certain élan. Les pays qui font partie de cette région d’investissement ont généralement bien géré leurs monnaies et leurs déficits. Si le dollar américain a atteint un sommet, la croissance et les valorisations pourraient s’améliorer.
SW : Je crois que le Japon peut encore surpasser le reste du monde au deuxième semestre. Si le dollar commence à s’affaiblir, cela pourrait constituer un obstacle si le yen reste fort. Je crois toutefois qu’il y a de bonnes occasions au Japon, simplement parce que les perspectives de bénéfices semblent raisonnables et qu’il y a beaucoup de restructurations qui pourraient stimuler la rentabilité des entreprises. Au-delà du Japon, je crois que les industries représentent une occasion intéressante, plus particulièrement aux États-Unis et en Europe. Aux États-Unis, nous n’avons pas encore vu les bénéfices de la délocalisation, de l’électrification, de l’accord CHIPS Act et de l’accord Inflation Reduction Act. Alors, tant que la récession est modérée, il est possible pour les industries de bien s’en sortir. Le scepticisme du marché à l’égard du secteur industriel est important, et c’est là que résident les occasions, surtout dans les biens d’équipement et la machinerie où les ratios sont assez faibles. Mais si nous avons raison en ce qui concerne certains de ces fondements à long terme, les bénéfices pourraient être plus robustes que prévu.
Y a-t-il un risque important pour le marché que les investisseurs ne prennent peut-être pas assez au sérieux?
JC : Je crois que le risque est que les bénéfices restent stables et que la Fed n’augmente pas ses taux. L’inflation est maîtrisée et la normale s’installe, et les gens qui disposent d’une grande quantité de liquidités dans des bons du Trésor ou des CPG à 5 % reviendront sur le marché. Le risque de hausse est donc aussi présent que le risque de baisse.
DS : C’est un scénario plausible, mais je voudrais offrir une vision différente. Au début de l’année, les intervenants sur le marché s’accordaient à penser qu’une récession était probablement imminente ou que nous y étions déjà. L’humeur des investisseurs était très négative. Maintenant, elle est passée de très pessimiste à neutre à peut-être un peu trop optimiste. Il est possible que les gens aient trop relâché leur vigilance. Peut-être qu’au moment où ils pensent que nous avons évité le pire, ils finiront par découvrir que la situation est pire qu’ils ne le croyaient, et que l’essorage du sentiment négatif s’estompera et commencera à aller dans l’autre direction. Ce n’est pas une prédiction, mais je pense que c’est un risque. Si tout le monde commence à croire qu’il n’y aura pas de récession, ironiquement, nous pourrions avoir des problèmes au cours des prochains trimestres.
KM : Le risque le plus important est le suivant : à quel point les banques centrales seront-elles énergiques face à la récession? Le marché pourrait avoir l’impression que la situation s’affaiblit et s’attendre à une baisse. Toutefois, si les banques centrales restent sur la touche pendant deux ou trois trimestres et laissent le taux de chômage augmenter trop, cela causera des difficultés, à notre avis.
SW : En même temps, si elles devaient procéder à des réductions dans ce contexte, alors que l’inflation demeure persistante, ce ne serait peut-être pas une bonne chose non plus. Il pourrait y avoir des difficultés dans une situation comme dans l’autre.
BD : Je crois que la gestion du risque sera un enjeu clé. La volatilité a augmenté d’environ 50 % par rapport à la période d’avant la COVID, alors que la surpondération des actions était le seul facteur en jeu. Nous devons renforcer la leçon que beaucoup de gens ont apprise à la dure, et elle porte sur le risque de séquence – lorsque des événements de la vie, plus particulièrement la retraite, coïncident avec un événement négatif important. En raison de la COVID, de nombreuses personnes ont pris leur retraite un peu plus tôt qu’elles n’auraient probablement dû, et elles se trouvent maintenant dans une situation très difficile. Je pense donc que nous devons réapprendre la gestion du risque.
KM : Nous oublions que les marchés sont devenus un peu complaisants en raison de ce manque de gestion du risque. L’indice de volatilité S&P 500 a commencé l’année à 20 et a bondi à la suite de l’affaire de la Silicon Valley Bank. Et il était à 13 récemment, malgré le fait que les choses étaient devenues plus difficiles en raison de la hausse des taux. Il existe donc une certaine complaisance.
JC : L’autre marché qui est devenu très complaisant est celui des options. Le positionnement des options est très énergique. Plus particulièrement, bon nombre d’investisseurs achètent des options d’achat à long terme.
Y a-t-il une chose sur laquelle vous vous concentrerez au deuxième semestre?
SW : L’inflation sera un facteur clé de la politique monétaire. Si l’inflation commence à diminuer plus rapidement, il faudra faire preuve de souplesse et de réactivité, car cela pourrait réduire le risque d’une grave récession. Mais, dans l’ensemble, n’oubliez pas que la diversification est un moyen gratuit d’aider à atténuer la volatilité du portefeuille en période d’incertitude.
JC : Du point de vue de la négociation, je surveillerai la liquidité et l’humeur des investisseurs. Je pense qu’elles dicteront l’orientation des marchés.
RS : La liquidité est importante, mais je pense aussi que pour nous, en tant que société, l’utilisation des compétences quantitatives dont nous disposons, ainsi que notre solide analyse fondamentale et notre solide assemblage de portefeuille, le sont tout autant.
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